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Polycopié du Module 5 « Vieillissement » 2010-2011 pour DCEM2 – Faculté de Médecine de Strasbourg CONFUSION, DEPRESSION, DEMENCES CHEZ LE SUJET AGE diagnostiquer un syndrome confusionnel, un état dépressif, un syndrome démentiel, une maladie d’Alzheimer chez une personne âgée, argumenter l’attitude thérapeutique et planifier le suivi du patient. Plan du chapitre
1. Modifications neuro-psychologiques du grand âge
Modifications macroscopiques
Modifications histologiques
Modifications neurochimiques
Modifications vasculaires.
Les performances intellectuelles.
Importance du contexte culturel, psychoaffectif et sensoriel.
2. Confusion mentale du sujet âgé
Le mode de survenue
Le tableau clinique
La conduite à tenir
3. Démences
La maladie d'Alzheimer
Les autres causes de démence
Prise en charge et traitement des démences
1. MODIFICATIONS NEURO-PSYCHOLOGIQUES DU GRAND AGE
L'étude du vieillissement cérébral est complexe car il est difficile de faire un lien précis entre les constatations
anatomiques, histologiques, neurochimiques, vasculaires et les productions mentales. Le vieillissement cérébral
organique est caractérisé par les modifications suivantes :
1.1 Modifications macroscopiques
Le poids du cerveau baisse après la cinquantaine d'environ 2 % par décennie. Il se constitue une atrophie corticale
qui prédomine au cortex frontal, temporal et à l'amygdale. De ce fait, le rapport L.C.R./ volume crânien
augmente. En TDM, une dilatation des ventricules, un élargissement des sillons et une légère atrophie corticale
sont compatibles avec un vieillissement normal.
1.2 Modifications histologiques
Les neurones, cellules post-mitotiques, ne se divisent pas et ne se renouvellent pas. L'apoptose, ou mort cellulaire
programmée, survient inéluctablement. Elle est constatée préférentiellement dans le cortex frontal, le cortex
temporal, l'amygdale et le locus niger.
Les neurones se chargent progressivement de lipofuschine, pigment résultant d'une dégradation des organites
intracellulaires, qui peut constituer 10 à 15 % du volume cellulaire.
Le nombre de plaques séniles, constituées de débris neuritiques et de substance amyloïde et observées dans les
espace intercellulaires, augmente avec l’âge. Les plaques séniles et la perte cellulaire étant retrouvées en très
grande quantité dans la maladie d'Alzheimer, la question d'un continuum entre le normal et le pathologique pose.
Les personnes autopsiées seraient-elles devenues symptomatiques d'une maladie d'Alzheimer si elles avaient vécu
10 ou 20 ans de plus ?
1.3 Modifications neurochimiques
Les systèmes monoaminergiques sous-corticaux sont inégalement sensibles au vieillissement :
ƒ Système dopaminergique : il existe une réduction de 3 à 5 % par décade de la voie nigrostriée. Les enzymes assurant la synthèse des neurotransmetteurs et leurs récepteurs diminuent. A l’inverse, les enzymes d'inactivation telles que la monoaminooxydase (M.A.O.) ou cathécolo-méthyl-transférase (C.O.M.T. ) augmentent. ƒ Les systèmes noradrénergique et sérotoninergique sont peu modifiés. ƒ Le système cholinergique est très influencé par l'âge. La concentration de l'enzyme de synthèse, la cholineacétyl transférase (C.A.T.) diminue dans le cortex frontal, temporal et dans l'hippocampe. ƒ Le système gabaergique baisse avec l'âge. La glutanate décarboxylase diminue et les récepteurs aux benzodiazépines liés aux récepteurs G.A.B.A. sont modifiés.
1.4 Modifications vasculaires
La circulation cérébrale est préservée en priorité quel que soit l'état circulatoire général. Le débit sanguin cérébral
global n'évolue pas beaucoup avec l'âge chez le sujet normal. Les techniques d'exploration SPECT (Single Photon
Computed Tomographie) et PET (Positron Emission Tomographie) permettent d'étudier la circulation corticale
locale. Elles montrent qu'il y a concordance entre une activité intellectuelle et le débit sanguin cortical
correspondant à la zone activée. Lorsqu’elle est observée, la baisse du débit sanguin cérébral, local ou global,
serait plus la conséquence que la cause du vieillissement cérébral.
1.5 Les performances intellectuelles
Le vieillissement cognitif est hétérogène. Certains sujets conservent un haut niveau de performance, d'autres non.
Chez les sujets qui subissent des modifications, toutes les capacités n'évoluent pas parallèlement. Les capacités
habituellement conservées sont :
• l’intelligence cristallisée : intelligence globale, stock lexical
• la capacité de comparaison et de confrontation avec des expériences antérieures
• la créativité artistique.
Les capacités susceptibles de diminuer sont :
• l’intelligence fluide : raisonnement inductif
• la mémoire d'acquisition ou d’apprentissage
• la vitesse d'exécution et de réponse.
1.6 Importance du contexte culturel, psychoaffectif et sensoriel
Le vieillissement cérébral est influencé par le contexte culturel, psychoaffectif et sensoriel.
ƒ Contexte culturel : un niveau d'éducation élevé favorise le maintien des performances intellectuelles, surtout
si le sujet conserve un intérêt pour la lecture, les informations et la nouveauté. ƒ Contexte psychoaffectif : la famille joue un grand rôle dans l’équilibre affectif du sujet âgé mais les relations
inter-familiales sont de qualité variable. Certains sujets font le vide autour d'eux alors qu'ils ont de la famille; d’autres, sans famille, sont remarquablement entourés. Le veuvage est un facteur objectif d'isolement. Le niveau des performances mentales varie en fonction du contexte psychoaffectif et des traitements psychotropes precrits en cas de troubles psychoaffectifs (dépression , anxiété, insomnie). ƒ Contexte sensoriel : Les troubles de la vue et de l'audition diminuent la qualité des afférences sensorielles. La
- Diminution des informations arrivant au cerveau, mauvais traitement de l'information faisant entrer en - Répercussions psychosociales : un trouble visuel grave entraîne un arrêt de lecture (journal) et une dépendance pour les activités de la vie quotidienne et les activités de loisir (broderie, bricolage). Ces pertes sont ressenties comme des deuils personnels. - Les troubles auditifs entraînent des difficultés à suivre les discussions de groupe et l'obligation de faire répéter. Il s'en suit une crainte d'importuner et un repli sur soi. Certains sourds développent également des troubles caractériels avec méfiance et idées de persécution. - Hallucinations et hallucinoses. La déprivation sensorielle favorise l'émergence d'hallucinations. Les troubles de la vision (cataracte et dégénérescence maculaire) sont responsables des hallucinoses du syndrome de Charles Bonnet : hallucinations visuelles pures, muettes, représentant des personnages, des paysages, donnant une impression de réalité, favorisées par la pénombre. Elles sont critiquées par le sujet et réduites par un bon éclairage.
Au tota
l, le vieillissement cérébral est un phénomène dans lequel interviennent plusieurs mécanismes. Le sujet
âgé présente un cerveau fragilisé, des organes sensoriels amoindris et un organisme plus sensible aux agressions
de tous ordres. Ceci explique la plus grande fréquence avec l’âge des troubles du comportement et des
perturbations idéo-affectives.
2. CONFUSION MENTALE DU SUJET AGE
L'état confusionnel ou delirium correspond à un état de faillite temporaire et réversible du fonctionnement
cérébral. Le dysfonctionnement cérébral est secondaire à une cause organique, métabolique, toxique,
psychologique. La disparition de la cause améliore la situation et permet le plus souvent le retour à l'état antérieur.
La survenue d'un état confusionnel n'est pas spécifique de la personne âgée. A n'importe quel âge, une poussée de
fièvre, une imprégnation éthylique, une déshydratation, peuvent entraîner des perturbations cérébrales. Toutefois,
du fait du vieillissement cérébral, le sujet âgé est plus fragile et sensible aux agressions physiques ou psychiques.

2.1 Le mode de survenue
Il est caractérisé par une installation rapide en quelques heures ou quelques jours au plus. Plus l'installation est
rapide, plus le diagnostic d'état confusionnel est vraisemblable, à l'inverse de la démence qui s'installe
progressivement sur plusieurs mois.
2.2 Le tableau clinique
Il varie d’un malade à l’autre et fluctue rapidement chez un même malade. La vigilance est altérée et varie au
cours de la journée : phases stuporeuses, hébétude, agitation psychomotrice, périodes de lucidité. L'inversion du
cycle nycthéméral est fréquente. L'humeur est marquée par une perplexité, une anxiété, une incompréhension de
ce qui se passe. Le langage est troublé : recherche de mots, fuite des idées. L'onirisme se manifeste par des
hallucinations visuelles et auditives, retentissant sur le comportement du malade.
Les éléments permettant de différencier confusion et démence sont rapportés dans le tableau1. Un état
confusionnel peut survenir chez un malade dément dont le cerveau est plus vulnérable que celui d’un vieillard non
dément. La différence entre confusion et psychose hallucinatoire chronique repose sur la connaissance des
antécédents.
2.3 La conduite à tenir est simple dans ses principes :
ƒ L’ interrogatoire recherche des informations sur l'état antérieur. Devant un malade en complète
désorganisation cérébrale, il faut s’enquérir auprès des proches de son état antérieur : état cognitif normal ou troubles de la mémoire et de l'orientation depuis quelques semaines ou mois. La recherche d’une cause médicamenteuse ou toxique doit être systématique : benzodiazépines, anticholinergiques , diurétiques, hypoglycémiants, alcool, CO. en faisant ramener les ordonnances et les boîtes retrouvées dans l'armoire à pharmacie et selon les circonstances particulières (chauffage défectueux). Un évènement socio-familial peut avoir un effet déclenchant : déménagement, entrée en institution, admission à l'hôpital, deuil récent. Souvent, les causes sont intriquées (tableau2). • Un deuil suivi de la prise de calmants. • Une fracture d'un membre suivie d'une hospitalisation, de douleurs , d'une anesthésie.
Tableau 1 : Critères différentiels de l'état confusionnel et du syndrome démentiel
Confusion
Démence
Antécédents
Evolution diurne
Vigilance, conscience
Hallucinations
Orientation temps et lieu
Activité psychomotrice
désordonnée) ou au contraire diminuée (apathie, somnolence) Discours
Souvent désorganisé, incohérent Normal au début, paraphasies, Délires
Signes d'atteinte neurologique
Tableau 2 : Causes possibles d'état confusionnel
Infections
Pneumopathie (ayant aussi un effet hypoxiant), infection urinaire, septicémie, diverticulite, érésipele. Cardiopathie
Insuffisance cardiaque décompensée, infarctus, troubles du rythme, embolie pulmonaire. Maladies cérébrales
A.V.C., A.I.T., hématome sous-dural, tumeur cérébrale, état postcritique Troubles métaboliques
Hypoxie (anémie, insuffisance respiratoire ou cardiaque), hyper ou hypoglycémie, hyponatrémie, hypokaliémie, urémie, insuffisance hépatocellulaire, hyper ou hypocalcémie, hyper ou hypothyroïdie, déshydratation Traumatismes
Post-chirurgie
Anesthésie, choc opératoire, immobilisation douloureuse. Affections somatiques diverses
Fécalome, rétention d'urine, ischiémie de membre ou mésentérique Evènements
Déménagement, hospitalisation, agression, deuil. Médicaments en cause
Narcotiques Sédatifs-hypnotiques (surtout benzodiazépines, Anticholinergiques : tricycliques, neuroleptiques sédatifs, antiparkinsoniens, atropine, scopolamine, antihistaminiques Antiulcéreux : cimétidine, ranitidine Anti-inflammatoires non stéroïdiens Corticostéroïdes Antiparkinsonniens : lévodopa, amantadine Divers : dérivés de la théophylline, antiépileptiques, digitaliques ƒ L’examen clinique doit être systématique et complet à la recherche d’une pathologie déclenchante :
déshydratation, infection respiratoire, infarctus du myocarde, trouble du rythme, insuffisance cardiaque, globe vésical, fécalome, ischémie aiguë, déficit neurologique, AVC. ƒ Les examens complémentaires
- Les examens biologiques peuvent mettre en évidence une anémie, un trouble hydroélectrolytique, une hypoglycémie, une dysthyroïdie , une hypercalcémie, une hypoxie. - L'E.E.G. montre un ralentissement diffus et symétrique des rythmes de fond. Il permet surtout d’éliminer une épilepsie fronto-temporale et une lésion focale intracrânienne. - Le scanner est parfois difficile à réaliser. Il doit néanmoins être demandé pour éliminer un hématome sous- ƒ Prise en charge thérapeutique
Elle repose sur des principes simples :
- Calmer et rassurer : le comportement verbal et non verbal du soignant est fondamental (tableau 3).
L'entourage doit être informé du diagnostic et du pronostic de réversibilité probable.
- Traiter la cause : correction d’une déshydratation, suppression d’un médicament potentiellement
responsable. Le pronostic de l'état confusionnel dépend du pronostic de l’affection causale.
Enfin si l'état confusionnel est lié à une succession d’évènements traumatisants (fracture-hospitalisation-
anesthésie, cambriolage-anxiolytiques) la récupération sera plus longue. Il faut savoir attendre que les vagues
émotionnelles se calment. L'attitude compréhensive des soignants et de l'entourage est le meilleur atout pour
le malade.
- Traiter les symptômes propres de l'état confusionnel. En cas d'agitation psychomotrice et/ou d'onirisme
mal toléré par ses effets anxiogène, il est licite de calmer le malade. On a recours à des neuroleptiques type
Halopéridol ou Tiapride en envisageant d'emblée leur réduction puis leur interruption dès que possible.

Tableau 3 : Attitude face à un confus
Eviter le bruit, l’agitation, la panique 3. DEMENCES
La démence est la plus grave transformation qui atteigne l'être humain vieillissant. Les causes sont dominées par
les maladies neurologiques dégénératives dont la principale est la maladie d'Alzheimer. L'apparition de
traitements actifs justifie que l'on préconise un diagnostic précoce. Une stratégie intelligente de prise en charge
limite les risques d'évolution catastrophique du malade mais aussi de son entourage. Les aspects sociaux,
sociologiques, psychologiques et médico-légaux font partie de la prise en charge. La démence est le problème
majeur de santé publique en gériatrie.
Le syndrome démentiel se définit comme étant une détérioration globale des fonctions cognitives chez une
personne ayant un état de conscience normal. La survenue et l'évolution sont progressives. Les troubles sont
irréversibles. Les critères diagnostiques selon le D.S.M. IV sont présentés dans le tableau 3. Un syndrome
démentiel correspond à la période d'état de pathologies multiples ayant les évolutions pré-cliniques de durées
inconnues.
Les causes des syndromes démentiels sont dominées par les maladies neurologiques dégénératives dont la
principale est la maladie d'Alzheimer. L'apparition de traitements actifs dans cette affection justifie que l'on
préconise un diagnostic précoce. Une stratégie intelligente de prise en charge limite les risques d'évolution
catastrophique du malade mais aussi de son entourage. Les aspects sociaux, sociologiques, psychologiques et
médico-légaux font partie de la prise en charge. La démence est le problème majeur de santé publique en
gériatrie.
3.1 La Maladie d'Alzheimer
La maladie d'Alzheimer (M.A.) représente 60 % des causes de démence en Europe. Elle a été décrite sur le plan
clinique et histologique par Aloïs Alzheimer en 1906.
Elle est caractérisée par une perte neuronale prédominant dans le cortex temporal et l'hippocampe, une
dégénérescence neurofibrillaire et des plaques séniles en grand nombre, contenant de la protéine amyloïde
insoluble.
L'acétylcholine est le neuromédiateur le plus diminué dans la M.A. Les médicaments récents disponibles visent à
maintenir le taux d'acétylcholine résiduel en inhibant l'enzyme de dégradation, l'acétylcholinestérase et/ou la
butyrylcholinestérase. A l'inverse les médicaments ayant un effet anticholinergique, aggravent ou révèlent sous la
forme d'un état confusionnel, la symptomatologie de la M.A.
ƒ Les facteurs de risque
Les mécanismes intimes de la M.A. sont encore inconnus. Parmi les facteurs de risque, le plus important est l’âge. Le second facteur est l’existence d’antécédents familiaux de la maladie. Deux mécanismes peuvent participer à la plus grande fréquence de la maladie d’Alzheimer dans certains familles : d’une part l’existence de mutations portant sur le gène de la préséniline 1, de la préséniline 2 et sur le gène de l’APP, d’autre part la présence du génotype 4 de l'apolipoprotéine E. Cependant, si le génotype 4 de l'apolipoprotéine E est un facteur de risque repéré au niveau d’une population, il ne peut être considéré comme un argument diagnostique individuel. Les facteurs biographiques et environnementaux existent aussi. D’autres facteurs de risque ont été décrits tels qu’un faible niveau socioculturel, des antécédents psychiatriques en particulier dépressifs, un traumatisme crânien, l’aluminium. A l’inverse, certains facteurs protecteurs ont été mis en évidence tels qu’un traitement par anti-inflammatoire non stéroidiens, par anti-oxydants, par oestrogènes. Par ailleurs, une consommation modérée de vin a été associée à une plus faible incidence de la MA dans l’étude Paquid. Les personnes inquiètes et les familles sont à l'affût de ces informations publiées par les médias. Le médecin doit en faire la lecture critique et donner les commentaires adaptés. ƒ Démarche diagnostique au stade débutant ou modéré Aux stades de début et modéré, la maladie
d'Alzheimer est caractérisée par l'installation de troubles intellectuels portant sur la mémoire, les fonctions exécutives, le langage, la cognition, les praxies. Différents signes doivent alerter l’attention du médecin et permettre de suspecter une maladie d’Alzheimer. Les manifestations les plus précoces et les plus fréquentes sont des troubles de mémoire portant sur les faits récents (détails de la vie quotidienne, emplacement d’objets, nom de personnes peu familières), puis les faits anciens (personnages connus, dates historiques, dates d’anniversaires des enfants, du mariage, de naissance) et des modifications du comportement (perte d’initiative, apathie, symptômes dépressifs) qui s’accompagnent d’un retentissement sur les activités de vie quotidienne. Au fur et à mesure, s'ajoutent : • une désorientation temporo-spatiale, Le premier signe qui doit faire penser à la maladie d’Alzheimer est la désorientation dans le temps. Elle se traduit par une difficulté à retenir la date du jour. La désorientation dans l’espace est habituellement plus tardive. Elle se traduit au début par des difficulté à fixer le nom des lieux où se trouve le patient lorsqu’ils lui sont inhabituels. A un stade plus avancé, l’interrogatoire de l’entourage peut révéler des difficultés à s’orienter dans un lieu non familier au patient (par exemple, dans une grande surface, ou lors d’un trajet en voiture inhabituel) • des troubles des fonctions exécutives font appel à la capacité du patient à organiser et réaliser une tache cognitive plus ou moins complexe nécessitant un plan de travail. Dans la vie quotidienne, ces troubles exécutifs se traduisent par exemple par des difficultés à remplir correctement sa déclaration d’impôts ou bien à planifier un trajet nécessitant plusieurs correspondance à partir d’un plan du métro. • des troubles du langage caractérisé au début par l’oubli des mots ou aphasie amnésique • des troubles praxiques (difficultés d’utilisation d’appareils ménagers) • des troubles gnosiques marqués initialement par des difficultés à reconnaître des symboles abstraits tels que des logos ou des panneaux routiers, puis des personnes ou des objets peu familiers Il n'y a pas d'atteinte de la vigilance et de la motricité. Il peut exister des troubles de l'humeur sous la forme d'un changement de caractère, d'épisodes d'agressivité, de jalousie, d'idées de persécution, de passivité. Les hallucinations sont rares à ce stade. L'évaluation des fonctions mentales se fait dans un premier temps en recueillant les éléments évoqués ci-dessus. Il est caractéristique que le malade se plaint moins que son entourage ce qui témoigne d'une anosognosie. Le diagnostic repose essentiellement sur la reconstitution de l'apparition des troubles, par l'interrogatoire du malade et des proches. ƒ Evaluation standardisée
Une première évaluation standardisée est faite par test de Folstein ou Mini Mental State Examination (M.M.S.E.) dont la passation dure une dizaine de minutes. C'est un test de dépistage accessible à tout praticien. Le score de 24/30 constitue le seuil d'une atteinte déficitaire. L'interprétation du score au M.M.S.E. doit être prudente. En effet, un haut niveau d'éducation, permet de maintenir un score supérieur au seuil tout en ayant une atteinte pathologique évidente. A l'inverse, un faible niveau intellectuel, handicape certaines personnes et crée de faux positifs. Rappelons enfin que lors d'un état confusionnel (exemple : imprégnation éthylique aiguë chez un sujet jeune), il y a des chances que le score de Folstein soit inférieur à 24 ! Pour un même malade, le M.M.S.E. permet un suivi comparatif. En cas de maladie d'Alzheimer, on observe une perte moyenne de trois points par année. L'existence de symptômes évocateurs d'installation progressive et un score de M.M.S.E. inférieur à 24, font évoquer à un syndrome démentiel. Il serait cependant abusif et dangereux de conclure à ce stade à ce diagnostic et de spécifier de plus qu'il s'agit d'un Alzheimer. Les fonctions exécutives peuvent être explorées de manière simple par les épreuves suivantes: • résoudre un problème d’arithmétique simple (Vous achetez 7 enveloppes à 5 centimes. Vous payez avec une pièce de 1 €. Combien doit-on vous rendre ?). • faire une épreuve de fluence verbale. On demande au patient de dire en 1 minute tous les noms d’animaux (fluence verbale catégorielle) ou tous les mots communs débutant par la lettre M (fluence verbale alphabétique ou littérale) qu’il connaît. Une fluence verbale inférieure à 15 pour les noms d’animaux, ou inférieure à 10 pour les mots débutant par la lettre M, est suspecte. Parmi les troubles praxiques, l’apraxie constructive est habituellement la plus précoce. Une des épreuves les plus sensibles pour la mettre en évidence est le test de l’horloge. On demande au patient de dessiner le cadran d’une horloge d’indiquer sur ce cadran toutes les heures, puis la petite et la grande aiguille qui marquent 16 heure 45. Les premières perturbations à cette épreuve sont des erreurs de positions des chiffres de l’horloge, une confusion entre la petite et la grande aiguille, et une erreur de position de la petite aiguille (qui doit être plus proche de 5h que de 4h). L’apraxie constructive peut être également mise en évidence en demandant au patient de dessiner un cube en perspective. Cette épreuve est cependant moins sensible que ne l’est le test de l’horloge, et sa réalisation dépend du niveau culturel du patient. ƒ Diagnostic
Ces tests doivent être complétés par une évaluation multidimensionnelle qui permet de faire le diagnostic de la maladie d’Alzheimer et de définir les orientations thérapeutiques. Cette évaluation pourra avoir lieu dans un centre expert, par exemple dans le cadre d’un hôpital de jour, et comportera : • Une anamnèse recueillie auprès du patient et de son entourage. Il est également important de connaître les médicaments ingérés par le patient. Des questionnaires sont remplis par le patient et l’entourage pour préciser l’intensité et les répercussions des troubles de mémoire. Par ailleurs, la famille remplit un questionnaire évaluant le retentissement sur les activités de vie quotidienne qui comportent d’une part les activités de base (toilette, repas.), d’autre part les activités plus complexes (prendre, les médicaments, les transports en commun, gérer ses finances, etc.). • Un examen somatique en particulier neurologique qui ne montre rien en dehors de signes qui seraient liés à • Un entretien psychologique ou psychiatrique est indispensable afin de préciser la personnalité du patient, le contexte familial et environnemental. Il permet de préciser l’existence de pathologies psychiatriques antérieures éventuelle, ainsi que les éventuels signes psychiatriques actuels. • L’évaluation neuro-psychologique permet de confirmer et de qualifier les troubles. Elle dure 1h30 à 2 h. et est réalisée par des médecins ou des psychologues expérimentés. Il existe une grande quantité de tests qui permettent d'explorer de façon approfondie la mémoire, le langage, les gnosies, les praxies gestuelles et constructives, les fonctions exécutives. L’évaluation comportera des épreuves de mémoire verbale (test de Grober et Buschke - tableau 4), de mémoire visuelle (reproduction de la figure de Rey, test de Benton), de mémoire associative (épreuve des mots couplés de Weschler), de mémoire logique (épreuve du récit de Weschler), ainsi que des épreuves appréciant les fonctions exécutives (Trail Making Test, épreuve de barrage, test de Stroop, test des cubes de la WAIS). Lors de l’évaluation neuropsycholo-gique, le patient doit porter ses lunettes et ses prothèses auditives si besoin. Le niveau socioculturel du patient doit être connu pour interpréter les résultats des tests neuro-psychologiques. Tableau 4 : Test de Grober et Buschke
Ce test permet de différencier un trouble de rappel en indiçage évoque un déficit d'encodage l'évocation d'un déficit de l'encodage. Dans la caractéristique d'une maladie d'Alzheimer. Par maladie d'Alzheimer, les déficits mnésiques portent ailleurs, la présence d'intrusions (le patient cite non seulement sur les mécanismes de rappel de d'autres mots appartenant à la catégorie sémantique : l'information comme dans les troubles bénins du par exemple tulipe, rose) est également en faveur sujet âgé ou les dépressions mais également sur les mécanismes d'encodage. Les processus de Le patient peut également bénéficier d'une épreuve facilitation du rappel n'améliorent que peu ou pas les de reconnaissance. Une liste de mots parmi lesquels figurent les mots présentés initialement ainsi que des L'indiçage consiste à donner un indice généralement mots nouveaux est présentée au patient. La la catégorie sémantique à laquelle appartient le mot reconnaissance correcte des mots cible témoigne que le patient doit retrouver. Par exemple, quel est le d'une difficulté d'évocation et non d'un trouble de nom de la fleur si l'item cible est une jonquille. Le l'encodage. La production de reconnaissances fait que le patient retrouve le mot après indiçage erronées (le patient croit reconnaître un item cible montre que ce dernier a bien été encodé et stocké. alors qu'il s'agit d'un mot distracteur) ou de fausses Ceci oriente vers un trouble de l'évocation ou trouble reconnaissances est en faveur d'une maladie de l'accès au stock mnésique survenant au cours des états dépressifs. L'absence d'amélioration du • Des examens biologiques (Numération Formule Sanguine, CRP, ionogramme sanguin, bilan hépatique, dosage de TSH, de calcémie, de vitamine B12, des folates voire gaz du sang selon le contexte.) vérifiant l’absence de facteurs somatiques, en particulier dysthyroïdie, anémie significative, syndrome d'apnée du sommeil, hyperparathyroïdisme susceptibles de participer aux troubles cognitifs. • Un examen tomodensitométrique cérébral, ou une imagerie par résonance magnétique en cas de doute sur l’existence de lésions vasculaires. Le but est d’éliminer des causes de démence “curable” (hématome sous-dural, hydrocéphalie à pression normale, tumeur cérébrale). L’existence d’une atrophie hippocampique est un bon signe en faveur de la maladie d’Alzheimer. • En fonction du contexte, certains examens pourront être demandés : sérologies syphilitiques et VIH, ponction lombaire permettant une analyse du LCR lorsqu’une affection systémique inflammatoire et/ou dys-immunitaire est suspectée, EEG lorsque le tableau est atypique. • La tomoscintigraphie d’émission monophotonique (SPECT) permet d’étudier le débit sanguin cérébral. Un hypo-débit pariétal ou bipariétotemporal est fortement évocateur d’une MA. Ses indications sont du domaine du spécialiste. La tomographie par émission de positons (PET) a une précision topographique supérieure à celle du SPECT et permet une mesure absolue du métabolisme cérébral. Elle reste limitée au domaine de la recherche. La spectroscopie par résonance magnétique fait également l’objet de travaux de recherche. Le diagnostic de maladie d’Alzheimer est fait selon les critères du DSM IV (tableau 5). L'utilisation des critères définis par le National Institute of Neu-rological Disorders and Stroke (NINCDS) et l'Alzheimer Disease Related Disorders Association (ADRDA) permet de retenir le diagnostic de maladie d'Alzheimer possible ou probable avec une probabilité comprise entre 90 et 95% (tableau 6). Tableau 5 : Critères de définition de la maladie d'Alzheimer selon le DSMIV
A. Apparition de déficits cognitifs multiples
C. L'évolution est caractérisée par un début
comme en témoigne à la fois :
progressif et un déclin cognitif continu.
1. une altération de la mémoire (altération de la D. Les déficits cognitifs des critères A1 et A2 ne
capacité à apprendre des informations nouvelles ou à sont pas dus :
se rappeler les informations apprises antérieurement) 1. à d'autres affections du système nerveux central 2. une ou plusieurs des perturbations cognitives qui peuvent entraîner des déficits progressifs de la mémoire et du fonctionnement cognitif (maladie cérébro-vasculaire, maladie de Parkinson, maladie de b) apraxie (altération de la capacité à réaliser une Huntington, hématome sous-dural, hydrocéphalie à activité malgré des fonctions motrices intactes) c) agnosie (impossibilité de reconnaître des objets 2. à des affections générales pouvant entraîner une malgré des fonctions sensorielles intactes) démence (par exemple hypothyroïdie, carence en d) perturbations des fonctions exécutives (faire des vitamine B12 ou en folates, pellagre, hypercalmie, projets, organiser dans le temps, avoir des pensées 3. à des affections induites par une sub-stance B. Les déficits cognitifs de critères A1 et A2 sont
4. les déficits ne surviennent pas de façon exclusive tous les deux à l'origine d'une altération
significative du fonctionnement social ou
professionnel et représentent un déclin significatif
par rapport au niveau de fonctionnement
antérieur.

Tableau 6 : Critères NINCDS-ADRDA de maladie d'Alzheimer
Possible
Syndrome démentiel isolé Troubles cognitifs progressifs Peut être associé à une autre affection systématique ou cérébrale Probable
Syndrome démentiel (cliniquement) Aggravation progressive dans au moins deux domaines cognitifs Perturbation des activités de la vie quotidienne et troubles du comportement Absence d'autre affection systémique ou cérébrale Certaine
Probable, plus preuve histologique (biopsie ou autopsie)
L’évaluation doit également prendre en compte les aspects somatiques,psychologiques, fonctionnels et sociaux
chez la personne âgée. L'étape suivante consiste à évaluer les modalités évolutives de la maladie et à apprécier les
capacités épargnées qui doivent être mises en valeur afin de retarder l'évolution des troubles. Il permet d’évaluer
le stade (léger, modéré ou sévère) de la maladie. Il est également important d’apprécier l'impact de la maladie sur
la vie affective et relationnelle du patient. Cette évaluation, qui s'aide notamment de tests psychométriques et des
échelles d'évaluation, est faite régulièrement pour guider la prise en charge à chaque étape de la maladie.
3.2 Les autres causes de démence
Les maladies neurologiques dégénératives et les destructions cérébrales d'origine vasculaires ou traumatiques sont
les étiologies des syndrome démentiels.
Le terme maladie d'Alzheimer était réservé pour les démences préséniles survenant avant 60 ans. Le terme est
étendu actuellement quel que soit l'âge sous la dénomination Maladie d'Alzheimer (MA) ou démence sénile de
type Alzheimer (D.S.T.A.). Nous en avons vu les caractéristiques essentielles et la démarche clinique.
ƒ La dégénérescence fronto-temporale (D.F.T.), estimée à 10 % des cas, est une démence corticale proche de
la maladie d'Alzheimer. La maladie de Pick fait partie des D.F.T. Les troubles amnésiques sont au second plan. Des troubles de l'humeur, du caractère et du comportement sont prédominants. Le diagnostic est actuellement fait selon les critères de Lund et Manchester (tableau 7). Tableau 7 : Démence fronto-temporale (critères de Lund et Manchester)

Troubles comportementaux :
- début insidieux et progression lente
- négligence physique précoce
- négligence précoce des conventions sociales - désinhibition comportementale précoce (hypersexualité, familiarité
- rigidité mentale et inflexibilité
- hyperoralité (gloutonnerie, consommation excessive de cigarettes ou alcool)
- stéréotypies et persévérations (déambulation, manièrisme, activités rituelles)
- comportement d'utilisation et d'imitation
- distractibilité, impulsivité
- perte précoce de l'autocritique (anosognosie)
Symptômes affectifs :
- dépression, anxiété, sentimentalité excessive, idées fixes, idées suicidaires, idées délirantes
- hypocondrie, préoccupations somatiques bizarres
- indifférence affective (manque d'empathie, apathie)
- amimie (inertie, aspontanéité)
Troubles du langage :
- réduction progressive du langage (aspontanéité)
- stéréotypies verbales et palilalie
- écholalie et persévérations
Préservation de l'orientation spatiale et des praxies
Signes physiques :
- réflexes archaïques précoces
- troubles sphinctériens précoces
- hypotension artérielle et variations tensionnelles
Examens complémentaires :
- EEG normal
- atteinte prédominant dans les régions frontales (TDM, IRM ou SPECT)
- troubles sévères des fonctions exécutives
ƒ Les démences sous-corticales et cortico-sous-corticales
On y trouve des signes psychiatriques fréquents et souvent initiateurs : troubles de l'humeur et de l'affectivité, troubles psychotiques (hallucinations, idées de persécution.) La répercussion sur le comportement social est précoce. Il existe un ralentissement des temps de réaction contrairement à la M.A. où les patients gardent une répartie rapide. La mémoire est touchée du fait de la bradyphrénie. Le souvenir est amélioré par l'indiçage : il s'agit plus d'une difficulté de restitution des informations que d'une difficulté d'endicage. Les étiologies sont : • Démence à corps de Lewy (D.C.L.) qui se caractérise par un syndrome extrapyramidal, des hallucinations visuelles, des épisodes délirants et une très grande sensibilité aux neuroleptiques. • Démence au cours d’une maladie de Parkinson • Démence de la paralysie supranucléaire progressive ou maladie de Steele-Richardson-Olszewski. ƒ Les démences vasculaires ou traumatiques font suite à des accidents cérébraux dont il existe des signes
cliniques neurologiques. Elles sont souvent mixtes c'est à dire associées à une M.A. sous-jacente dont elles enrichissent la symptomatologie. Plus le sujet est âgé, plus il y a une chance que les troubles aient une composante vasculaire. 3.3 Prise en charge et traitement des démences
La prise en charge et le traitement de la D.S.T.A. et des autres syndromes démentiels sont un parcours long et
difficile. A partir des premiers troubles et du diagnostic plus ou moins tardif qui y fait suite, s'ouvre une période
longue de plusieurs années, 5 à 15 ans, où des adaptations successives des traitements et de l'organisation de vie
devront être opérées.
ƒ Prise en charge des troubles cognitifs de la MA
Les traitements médicamenteux actuels de la MA sont essentiellement substitutifs. Il s’agit d’anticholinestérases, inhibant l'enzyme de dégradation de l'acétylcholine et permettant par cet effet de soutenir le taux d'acétylcholine déficitaire. Trois molécules sont disponibles : le donépézil (Aricept°), la rivastigmine (Exelon), et la galantamine (Réminyl). Leur prescription est soumise à des critères de dispensation et de surveillance rigoureuse. Les médicaments doivent être prescrits au début par un spécialiste de la maladie d'Alzheimer (gériatre, neurologue ou psychiatre). Ce spécialiste doit avoir connaissance des autres traitements pris par le patient afin d'éviter certaines associations dangereuses. Le médecin généraliste peut ensuite renouveler les ordonnances. Une évaluation par le spécialiste doit être refaite tous les 6 ou 12 mois selon le médicament. Ces médicaments sont indiqués lorsque la maladie est d’intensité légère, modérée et modérément sévère. Ils sont actifs chez un certain nombre de patients seulement. Rien ne permet actuellement de prédire leur efficacité à l'avance. Si le traitement est efficace, le déclin peut être stabilisé pour un temps donné ou la dégradation plus lente qu'elle ne serait survenue spontanément. Ceci peut permettre de maintenir une autonomie compatible avec le maintien à domicile plus longtemps. Ces médicaments peuvent avoir des effets secondaires d'ord re digestif (nausées, vomissements voire diarrhée) ou psychique (insomnie, asthénie) ou de bloc auriculo-ventriculaire. Les caractéristiques principales des anticholinestérasiques sont résumées dans le tableau 8.
Tableau 8 : Caractéristiques principales des anticholinestérasiques
Donépezil
Rivastigmine
Galantamine
Inhibiteur sélectif et réversible Inhibiteur pseudo-irréversible de l’acétylcholinestérase Potentialisation de l’action intrinsèque de l’acétylcholine sur les récepteurs nicotiniques réserve d’une tolérance satisfaisante Les anticholinestérasiques sont à administrer avec précaution dans les cas suivants : affections cardiovasculaires (effet vagotonique sur le rythme cardiaque) ; affections gastro-intestinales (ulcère) ; affections neurologiques (potentialisation des crises convulsives généralisées) ; troubles génito-urinaires (rétention urinaire) anesthésie (exacerbation de la relaxation musculaire) Contre-indications Hypersensibilité aux dérivés sévère ou rénale sévère Grossesse, allaitement Urinaire (57 %), fécale (15 %) Urinaire sous forme métabolisée Taux réduit par les inducteurs Possibilité d’interaction avec les
Pour les stades modérément sévères et sévères
(Folstein < à 15), il est possible de prescrire de la
Mémantine (Ebixa) qui intervient dans le dysfonctionnement de la neuro-transmission glutama-ergique
en particulier au niveau des récepteurs NMDA.
La prescription doit respecter des paliers hebdomadaires de 5mg pour passer de 5 à 20mg en 4 semaines
s’il y a une bonne tolérance (hallucinations, confusion).

Actuellement, d’autres molécules sont en cours d’expérimentation comme les agonistes cholinergiques
muscariniques. Des traitements visant à pallier les déficits cérébraux des monoamines (sérotonine, dopamine)
pourraient également s’avérer intéressants (inhibiteurs de la monoamine oxydase). Des voies prometteuses s’orientent vers la recherche de produits empêchant la formation des lésions neuropathologiques (dégénérescence neurofibrillaires, plaques séniles) en intervenant sur les processus physiopathologiques impliquant la protéine tau et le peptide Ab ou empêchant la mort neuronale. Leur rôle symptomatique et/ou préventif dans la maladie d’Alzheimer des inhibiteurs calciques (nimodipine), des oestrogènes, de la sélégiline, de la vitamine E, des anti-inflammatoires non stéroïdiens fait l’objet d’études à l’heure actuelle. Quant au « vaccin », il s’agit d’une tentative de destruction des plaques séniles et de leur composant présumé toxique, la protéine béta-amiloïde, par la production d’anticorps spécifiques. Les essais prometteurs chez l’animal, ont abouti à un essai chez l’homme. Celui-ci a été interrompu assez rapidement en raison de la survenue d’encéphalites graves. Cette voie de recherche est poursuivie avec la mise au point d’anticorps spécifiques à injecter au malade et non plus à lui faire produire. La prise en charge ne se limite pas à l'éventuelle prescription d'un traitement symptomatique des troubles de la mémoire. Il existe un risque important que l'entourage prive le malade de toute activité et de tout contact par honte et par crainte. Ceci ne peut qu'aggraver la déperdition des fonctions encore présentes. Le maintien, voire la restitution temporaire de certaines capacités, passe par un certain nombre de recommandations : - Maintenir un bon état physique : encourager la marche par des promenades quotidiennes ; - Stimuler et encourager la pratique d'activités quotidiennes d'occupation ou de loisir : cuisine, vaisselle, ménage, bricolage, jardinage. Selon l'état du malade, il s'agit de le laisser faire, de le surveiller ou de le guider. La notion de plaisir est à rechercher. - Maintenir une vie sociale : garder le lien avec des amis en les avertissant de l'existence des difficultés chez le malade, fréquenter les magasins (à des moments de moindre cohue),les restaurants, les lieux de culte. D'autres prises en charge à visée thérapeutique sont tentées. Leur efficacité sur les troubles cognitifs est controversée. Par contre, il existe un indiscutable effet de bien-être pour le patient et de sentiment de soulagement et de déculpabilisation des proches. Voici quelques exemples : - Groupes de stimulation de la mémoire - Prise en charge par un orthophoniste - Atelier d'expression artistique : peinture, modelage. - Musicothérapie - Contact avec des animaux de compagnie. Sur le plan de la surveillance médicale et des co-prescriptions, ces malades doivent être suivis attentivement. Les symptômes fonctionnels d'autres pathologies sont mal exprimés du fait des difficultés d'expression et de compréhension. L'entourage peut aider à décoder les "plaintes" du malade. Il convient d'être très économe dans les médicaments et de proscrire les molécules anticholinergiques. ƒ Prise en charge des troubles du comportement
Les troubles du comportement sont inévitables. Ils sont de deux origines : soit endogènes, faisant suite à une production délirante ou hallucinatoire par exemple, soit exogènes c'est à dire réactionnels à ce que le malade perçoit de sa situation et de son environnement. Les deux mécanismes peuvent s'associer. Il est important, devant un trouble du comportement, de savoir analyser le mécanisme en cause. S'il s'agit d'un t rouble apparemment sans délire ni hallucination, que s'est-il passé ? Une reconstitution des circonstances et des paroles et attitudes des protagonistes, apporte souvent une explication vraisemblable à la réaction du malade. Si l'entourage apprend ainsi, par les expériences successives, à mieux connaître les réactions du malade et si le médecin explique et fait comprendre, la prise en charge sera de plus en plus adaptée et compréhensive. A l'inverse, la prescription automatique de psychotropes, sédate le malade et ne règle pas ses difficultés quotidiennes. C'est à dire que l'entourage doit apprendre à connaître et à comprendre les réactions du malade. Le médecin traitant n'est pas toujours à l'aise dans la formation et le conseil vis à vis des familles. Les Hôpitaux de Jour et autres Centres experts ainsi que les associations de soutien (France Alzheimer et associations départementales) donnent des avis et de la documentation conçue à l'usage des proches. Toutes les difficultés comportementales ne se règlent cependant pas par des attitudes intelligentes et adaptées. Il est nécessaire de traiter les symptômes gênants tels que agressivité, anxiété, insomnie, dépression. Un délire n'ayant pas de conséquence pénible pour le malade et tolérable par l'entourage n'est pas forcément à traiter. Les traitements par psychotropes respectent les principes suivants : - Monothérapie si possible - Durée de vie courte - Traitement de quelques jours ou semaines puis essai d'arrêt. ƒ L'action de l'entourage et l’aide aux aidants
L'entourage à une importance essentielle dans le projet thérapeutique du malade. Au moment où le diagnostic est posé, les réactions de l'entourage familial sont variées : négation, catastrophisme, courage. L'entourage n'est pas fait que d'une personne : il y a le conjoint, les enfants, les gendres et belles-filles etc.Chacun réagit en fonction de l'histoire familiale. Tout peut se voir depuis la cohésion totale au déchirement sordide. Le médecin doit savoir quel est l’entourage du malade ou si celui-ci est seul. En cas de cohabitation, il en évalue la disponibilité, la cohésion, la solidité psychologique. Quoiqu'il en soit, toute famille, même la mieux disposée et la plus solide, a besoin de conseils, de soutien psychologique et d'encouragements. La démence entraîne une dépendance rapidement importante. Toutes les activités sociales et domestiques sont compromises : gestion, achats, utilisation des moyens de transport, ménage, cuisine. Les activités de soin personnel sont également touchées : prise des médicaments, capacité à communiquer, à sortir seul de chez soi en sécurité, à faire sa toilette et à s'habiller. Seule la locomotion est longtemps préservée et c'est ce qui cause parfois le plus de difficultés. Le malade ne sait plus accomplir un certain nombre de tâches. Par contre, il fait parfois des "bêtises : déplacer des objets, ouvrir des robinets, cacher de l'argent, jeter un courrier important. L'entourage doit donc compenser les manques et surveiller ou réparer les actes aberrants. Quelles aides peuvent être apportées aux aidants ? On recommande des aides pour la toilette, l'habillage et la propreté sphinctérienne. L'intervention d'un tiers est parfois mieux acceptée par le malade que si c'est un membre de la famille qui en a la charge. Le besoin principal des familles est d'avoir des moments de répit : une ou deux journées par semaine d'accueil en Hôpital de Jour ou en Centre de Jour, ou bien hébergement temporaire de deux à trois semaines une ou plusieurs fois par an dans une institution. Certaines aides sont financées par la Sécurité Sociale (Hôpital de Jour, soins infirmiers à domicile), d'autres sont à la charge du malade (changes jetables pour incontinent, accueil de jour, hébergement temporaire) qui peut être aidé dans le cadre de l’allocation personnalisée d’autonomie (APA). ƒ Eléments de suivi
Le suivi d'un malade dément est une histoire de plusieurs années. En moyenne, on admet que 80 % de la durée de la maladie se passe au domicile et 20 % (les phases terminales) dans les hôpitaux ou les institutions. La majorité de la durée est donc sous la surveillance des médecins généralistes. En ce qui concerne le malade, le suivi des fonctions mentales peut se faire par le M.M.S.E. Si le malade est suivi par un centre expert, les éléments psychométriques contrôlés sont plus précis. Sur le plan physique, on suit le poids et l'état nutritionnel en s'enquérant de l'appétit. Les autres questions concernent e sommeil, l'humeur et les activités exercées. Enfin, la détection d'affections concomitantes et leur suivi est indispensable malgré les difficultés de communication et d'examen. En ce qui concerne l'entourage, on s'enquiert de sa résistance, de son moral, des questions qu'il se pose et des limites qu'il se fixe. Le sentiment de culpabilité est fréquent. ƒ Sécurité et protection du malade
La démence crée des risques et des dangers. Le malade est précocement incapable de gérer ses affaires. Si l'entourage le fait avec bienveillance et sans contentieux entre ses membres, il n'y a pas lieu d'intervenir. Par contre, si le malade est seul, s'il est exposé à des manipulations ou si la discorde s'installe dans son entourage, la loi permet de le mettre sous protection juridique. Une première mesure à effet immédiat de protection est la sauvegarde de justice. Elle est décidée par le procureur de la République et sur signalement. Il s'agit d'une mesure non publique qui permet de faire annuler les malversations dont la personne protégée aurait été victime du fait de sa vulnérabilité. La sauvegarde de justice dure six mois. C’est une mesure d'attente d'un éventuel jugement de tutelle ou curatelle. La curatelle et la tutelle sont des mesures résultant d'un jugement (juge des tutelles) au vu d'un certificat médical d'un médecin expert agréé par le tribunal d'Instance, d'une audition du malade et d'une audition des membres de la famille par le juge. Celui-ci prononce le jugement en choisissant la mesure appropriée (curatelle, tutelle) et en désignant le curateur ou tuteur. La curatelle est une protection qui respecte le droit de vote et permet au majeur protégé d'effectuer les actes de gestion qui doivent être contresignés et approuvés par le curateur. La tutelle réduit le protégé au niveau d'incapable majeur et lui re t i re ses droits civiques. En cas de M.A. ou d'autres démences, la tutelle est la mesure habituellement adaptée. La loi de 1968 a été remplacée par la loi n°2007-308 du 5 mars 2007, qui entre en vigueur le 1er janvier 2009. Elle prévoit la rédaction par chacun d’un « mandat de protection future » qui permet de désigner à l’avance la personne à qui l’on souhaite confier la gestion de ses affaires « au cas où ». La sécurité et la protection des malades se fait aussi dans la vie quotidienne. La conduite automobile est fortement déconseillée même si les malades au stade débutant ne comprennent pas qu'on mette en cause leur compétence. Dans le logement, il faut penser à la sécurité : gaz, électricité, eau, escaliers, médicaments, produits ménagers. Enfin, le médecin traitant doit savoir que la démence est un facteur de risque de maltraitance. La charge physique et psychologique écrase les aidants non préparés, mal soutenus, ayant des difficultés psychiques. Par exaspération, par vengeance parfois, des malades sont battus, insultés, surcalmés par des médicaments, laissés dans leurs déjections. Les troubles de la mémoire ou les propos "délirants", procurent une amnistie aux auteurs. La détection des signes de maltraitance fait partie des critères de suivi.
Plan du chapitre
1. Epidémiologie
2. Aspects séméiologiques
L'intrication du vieillissement et de la comorbidité
Formes cliniques difficiles
Dépression et démences
Dépression et maladie de Parkinson
Les dépressions secondaires à des affections somatiques
Les formes mélancoliques imposent une hospitalisation en urgence
Le risque de suicide
L’évaluation de la sévérité de l’état dépressif
3. Les thérapeutiques
Les traitements médicamenteux
La sismothérapie
Autres types de prise en charge
Les états dépressifs du sujet âgé (EDA) sont fréquents et de diagnostic difficile du fait de leur hétérogénéité clinique. Le contexte dans lequel les EDA s’inscrivent est complexe ; les dimensions sociales, psychologiques, environnementales et biologiques sont intriquées. Les EDA sont méconnus banalisés, souvent considérés comme une conséquence du vieillissement. De ce fait ils sont insuffisamment traités et ne bénéficient pas d'une prise en charge globale. Ce défaut diagnostique est lié : ƒ à la difficulté des malades âgés à exprimer leur douleur morale, ƒ à la difficulté pour les médecins d’ajouter la problématique psychiatrique aux prises en charge somatiques. La non-reconnaissance des états dépressifs a pour conséquence l'augmentation du taux de suicide surtout après 80 ans. Le risque de passage à l'acte suicidaire est plus important que chez l’adulte jeune. Ces éléments en font un problème de santé publique dans nos sociétés.
1. EPIDEMIOLOGIE
Les données épidémiologiques s'accordent sur une fréquence importante des EDA, bien que variable selon les
études. On peut aussi discuter de l’usage d’instruments qui n'ont pas été construits pour des personnes âgées et
qui sont parfois, trop ou au contraire trop peu sensibles.
Dans la population générale, il est admis que des symptômes dépressifs pourraient concerner 15 % des individus
tandis que la prévalence d'un épisode dépressif majeur est de l'ordre de 3% au delà de 65 ans. Dans les institutions
d'hébergement, il est rapporté des prévalences allant de 5 à 30 %. Certains travaux mettent en évidence le fait que
dans la première année suivant l'admission en institution, un épisode dépressif majeur survient chez 10 à 15 % des
résidents.
Les principales caractéristiques sociales ou démographiques associées à la survenue d'une dépression sont
comparables à celles qui ont été décrites chez l'adulte jeune. La dépression est plus fréquente chez les femmes
notamment les veuves, chez les personnes qui ne bénéficient pas d'un entourage attentif, chez les malades
souffrant d'affections somatiques graves et notamment d’affections sensorielles. En outre les changements de
mode vie, les séparations, les deuils, le confinement à domicile, la perte des liens sociaux et familiaux, la perte
des rôles sociaux ou au contraire un rôle nouveau comme celui qui consiste à prendre en charge son conjoint
dépendant sont autant de facteurs favorisant les EDA.
2. ASPECTS SEMEIOLOGIQUES
2.1 L'intrication du vieillissement et de la co-morbidité
Chez le malade âgé, la sémiologie dépressive s'exprime avec retard, par des symptômes moins expressifs que
chez l'adulte d'âge moyen. Les états dépressifs associent classiquement deux signes fondamentaux : douleur
morale et ralentisseent.
Chez le malade âgé, cette symptomatologie est banale, relevant du vieillissement ou de pathologies organiques
fréquentes à cette période de la vie.
Concernant la douleur morale, rappelons que le sujet âgé doit s’adapter au remaniement de ses capacités et de ses
aptitudes. Ceci entraîne l'expression de sentiments qui ne traduisent que les efforts consentis pour accepter le
processus du vieillissement. Ces sentiments peuvent être alors pris, à tort, pour une véritable souffrance.
La douleur morale ne saurait donc seulement se définir par l'impression, perçue trop rapidement, d'une souffrance
psychique. Elle doit être toujours envisagée dans le contexte plus global de son origine, de sa tonalité et de son
retentissement.
La tristesse n'est pas forcément signe de dépression puisqu'elle fait partie des réactions normales à une perte (fréquente chez le vieillard). Ce trouble ne traduit une dépression que s’il est disproportionné par rapport aux difficultés existentielles et s’il envahit la totalité de sa vie psychique. Le ralentissement, classiquement qualifié d'idéomoteur, puisqu'il affecte la pensée et l'activité physique, est difficile à apprécier. En effet, le vieillissement et certaines maladies (par exemple : maladie de Parkinson, hypothyroïdie, insuffisance cardiaque) peuvent donner l'impression d'une vivacité atténuée. De même, la réduction de la fluidité verbale, de la richesse du langage et des associations d'idées dans certaines démences débutantes, peuvent être pris, de manière inconsidérée, comme des signes de ralentissement. D’autres éléments orientent vers le diagnostic de dépression : ƒ Le sentiment de vide intérieur et de vacuité douloureuse
Il est généralement exprimé sous la forme d'un vécu de solitude intense. Ce sentiment de solitude est parfois purement subjectif et peut contraster avec l'existence d'un réel soutiens de l'entourage. On en rapproche les plaintes portant sur la mémoire. ƒ Les plaintes somatiques et les troubles du comportement
Fréquents, ils sont considérés comme un moyens d'exprimer le vécu douloureux de la dépression. Il faut rechercher plus particulièrement une asthénie, une anorexie, un amaigrissement, des troubles du comportement alimentaire et des troubles du sommeil. La dépression peut, aussi, s'exprimer par des troubles caractériels. Le sujet devient irritable ou présente des réactions incompréhensibles pour son entourage, ce qui le confine dans un certain isolement. Enfin, un alcoolisme compulsif récent peut traduire une dépression débutante. ƒ L'angoisse
L'intrication des sémiologies anxieuses et dépressives est fréquente. Lorsque les symptômes anxieux sont au
premier plan, le malade s'agite, s'accroche à qui passe, à la recherche d'une réassurance possible. A l'inverse,
le malade peut resté confiné au lit dans une attitude régressive, se reposant sur l’entourage ou l’institution
pour tous les actes de la vie quotidienne.
2.2 Formes cliniques difficiles
ƒ Elles se présentent sous la forme d'un délire, volontiers persécutifs. Ce délire est dit "congruents à l’humeur" car il a une tonalité triste. On retrouve fréquemment des idées d'incurabilité ou de ruine. Le diagnostic de dépression est difficile car elle masquée par le vécu délirant. Ces formes sont parfois difficiles à différencier d’autres pathologies délirantes tardives et imposent un recours au psychiatre. ƒ Les dépressions hypocondriaques
Elles peuvent prendre le masque d’une pathologie organique et donnent lieu à des investigations diverses et répétées. L’absence d'amélioration durable est la règle, même avec une prescription bien conduite.
2.3 Dépression et démences
Il existe alors un recouvrement séméiologique. Toutes les démences qu'elles soient dégénératives corticales et
surtout sous-corticales, vasculaires peuvent être associées à des épisodes dépressifs au cours de l'évolution. Les
problèmes physio-pathologiques et cliniques sont complexes.
ƒ Dépression précédant la démence.
La dépression peut être la conséquence d'une prise de conscience douloureuse de l'installation dus déficits intellectuels. Les mécanismes de défense habituels sont bouleversés et l’estime de soi diminuée. La survenue de la dépression traduit une tentative d’adaptation. Elle peut être aussi la conséquence directe des perturbations neuronales dues à la maladie. La prévalence de la dépression au cours d’un syndrome démentiel est de 20 % à 50 %. Les facteurs de risques potentiels d'évolution vers une démence d’un EDA sont de mieux en mieux connus même si certains sont controversés : les antécédents dépressifs personnels ou familiaux, le sexe féminin et la présence d'un allèle E4 au génotypage de l’apolipoprotéine E. Dans la pathologie démentielle au début, une attention particulière doit être apportée aux signes précurseurs de démence frontale. Les signes inauguraux sont souvent psychiatriques, prenant le masque d’une dépression atypique, avec manque de motivation, apathie, apragmatisme, repli sur soi, etc. L’examen neuro-psychologique doit aussi explorer les fonctions exécutives frontales. ƒ Dépression au cours d’un état démentiel diagnostiqué
Plus la pathologie démentielle progresse, plus il devient compliqué de reconnaître une dépression. Les signes directs de dépression (immobilité, atonie de la mimique, masque de la douleur, sémantique dépressive des mots perdus, difficultés alimentaires et troubles du sommeil) s’expriment à travers la symptomatologie de la démence. Il est important d’être attentif à des signes indirects que sont les modifications comportementales, les cris, l’agitation, l'appel de membre de la famille (maman.). ƒ Etat dépressif et Maladie d’Alzheimer traitée
Les anticholinestérasiques (médicaments récemment utilisés comme traitements symptomatiques de la démence d'Alzheimer) sont potentiellement à l’origine d'états dépressifs. S'ils sont efficaces, c'est par une prise de conscience douloureuse, mais peut-être aussi par un mécanisme biochimique. Bien qu’encore insuffisamment documentée, il faut connaître l’existence de ces syndromes renforçant la nécessité d’un suivi global et attentif de toutes les manifestations.
2.4 Dépression et maladie de Parkinson
La présence de symptômes dépressifs ou d’humeur triste au cours de l'évolution n’est pas seulement la
conséquence affective d’une affection invalidante. Certains auteurs considèrent la dépression comme un signe de
la maladie de Parkinson. Dans 15 à 25 % elle précède ou est concomitante des premiers symptômes. D'intensité
variable (le plus souvent légère à modérée), le diagnostic en est difficile, basé sur la dévalorisation, le
pessimisme, l’anhédonie et, les idées suicidaires. Par contre la présence d'asthénie, de diminution de l'intérêt, de
troubles du sommeil ou de l'appétit peuvent se rencontrer dans la symptomatologie de la maladie de Parkinson.
2.5 Les dépressions secondaires à des affections somatiques
Elles posent en fait le problème du défaut de leur diagnostic. S'inscrivant dans le cadre d'une maladie grave
comme le diabète, le cancer ou l’insuffisance cardio-respiratoire, elles restent encore insuffisamment évoquées et
par conséquent non traitées. Elles peuvent aussi émailler l'évolution d’une hydrocéphalie à pression normale,
d’une hypothyroïdie et de toute affection douloureuse chronique. Toutes ces dépressions, même après traitement
de la maladie causale, évoluent dans la majorité des cas pour leur propre compte. On en rapproche les dépressions
secondaires à certains traitements médicamenteux tels les anti-hypertenseurs centraux ou les neuroleptiques.
2.6 Les formes mélancoliques imposent une hospitalisation en urgence
Une authentiques mélancolie peut survenir chez le sujet âgé. Elle prend l'aspect d'une dépression intense avec
prostration et mutisme, ou au contraire agitation et agressivité. Une perte de poids importante, une insomnie
prédominante en fin de nuit sont généralement associées et peuvent entraîner des troubles somatiques. Un épisode
mélancolique peut représenter l'évolution d'un trouble bipolaire déjà connu ou inaugurer une maladie bipolaire
alternant, par la suite, des accès maniaques et mélancoliques. La notion d'antécédents familiaux est plus rarement
retrouvée que chez l'adulte jeune. Ces épisodes mélancoliques constituent des urgences thérapeutiques du fait de
leur retentissement somatique rapide et du risque important de conduite suicidaire.
2.7 Le risque de suicide
La dépression du sujet âgé est d'évolution lente, confinant le patient dans une souffrance parfois intense et
durable, provoquant ainsi l'épuisement de la famille comme du médecin traitant. Cette évolution est encore plus
nette lorsque le patient présente aussi une maladie somatique associée. Une dépression aggrave le niveau de
dépendance ou de recours au soins. Cette évolution est aussi responsable d'un rejet prématuré du traitement,
donnant lieu à des prescriptions nouvelles tout aussi inefficaces car poursuivies insuffisamment longtemps.
Le risque évolutif majeur reste le passage à l'acte suicidaire, qu'il s'inscrive dans le cadre d'un raptus anxieux ou
qu'il constitue une évolution incontrôlable du trouble dépressif, notamment lorsqu'un vécu délirant est associé. Il
doit ainsi être porté une attention particulière aux antécédents personnels et familiaux de conduite analogue, aux
idées suicidaires exprimées par le patient, qu'elles prennent l'aspect d'une rumination ou d'une menace adressée à
l'entourage. Il convient aussi d'évaluer l'intensité d'un éventuel vécu délirant notamment lorsque la méfiance et le
repli apparaissent au premier plan.
Enfin, rappelons la possibilité de survenue d'un état d'opposition massive avec mutisme, prostration et refus
alimentaire absolu pouvant entraîner le décès en quelques jours.
2.8 Evaluation de la sévérité de l'état dépressif
L'évaluation de la gravité est un guide dans la mise en place d'un plan de soins.
Les instruments d'évaluation de la sévérité sont utiles pour apprécier l’efficacité d’un médicament antidépresseur,
mais la plupart ont été établis pour une population adulte et leur usage dans la population âgée est réservé.
Les instruments les plus utilisables (voir annexe) sont :
ƒ la Geriatric Depression Scale de Brink et Yesavage, autoquestionnaire de 30 items ƒ la Montgomery and Asberg Depression Rating Scale (MADRS) ƒ l'échelle de dépression d'Hamilton (Hamilton Depression Rating Scale, H.D.R.S.)
3. LES THERAPEUTIQUES
Elles comprennent les traitements chimiques, l'électroconvulsivothérapie, la psychothérapies et la prise en charge
psychosociales.
Les buts du traitement sont multiples :
ƒ diminuer les symptômes de la dépression, ƒ réduire le risque de rechutes et de récidives, ƒ améliorer la qualité de vie, ƒ améliorer l'état de santé, ƒ diminuer les coûts de santé et la mortalité.
3.1 Les traitements médicamenteux
Toutes les molécules antidépressives présentent une efficacité comparable. Le risque d'accumulation de ces
produits et de leurs métabolites expose toutefois le sujet âgé à des effets indésirables plus fréquents et plus
marqués. Le choix de la molécule est fonction de son profil pharmacologique, de ses effets adverses et de sa
tolérance. La prescription d’un sérotoninergique en première intention est rendue aisée par l’absence d'effets
anticholinergiques et parce qu'ils n'exposent pas au risque d'hypotension orthostatique des tricycliques. Par contre,
les effets secondaires sont digestifs (nausées, anorexie, diarrhée) et doivent être surveillés chez la personne âgée à
risque de dénutrition. Les sensations d'irritabilité, les tremblements, l’agitation et l’insomnie sont également à
surveiller. D’autres molécules peuvent être employées en première intention, mais les antidépresseurs
imipraminiques ne doivent être prescrits qu’en milieu spécialisé. Leurs effets indésirables sont bien connus :
sécheresse buccale, constipation, rétention urinaire sur obstacle, hypotension, arythmies et confusion. Les contre-
indications les plus strictes sont cardiaques (troubles de la conduction imposant un ECG avant toute prescription),
oculaires en cas de glaucome et urinaires en cas d'adénome prostatique.
La durée optimale du traitement antidépresseur est
ƒ de 4 mois après l'arrêt de la symptomatologie, (6 et 9 mois au maximum) s’il s’agit d’un premier épisode. ƒ d’un an au moins en présence d’une forme récurrente ou d’une dysthymie. L’emploi des thymorégulateurs (en dehors du lithium pour sa tolérance moyenne chez le sujet âgé), la carbamazépine ou le dépamide sont une aide dans ce type de dépressions résistantes.
3.2 La sismothérapie
La cure de sismothérapie, ou d'électro-convulsivothérapie est indiquée dans les formes mélancoliques ou dans les
formes avec repli engendrant une réduction alimentaire marquée. Elle consiste à provoquer, par un choc
électrique de faible ampérage, une crise comitiale généralisée, la manoeuvre étant répétée tous les deux jours.
L'efficacité est généralement obtenue après une série de 3 à 9 chocs électriques. On estime que la guérison est
consolidée après une série totale de 12 chocs. Ce traitement présente un intérêt incontestable du fait de sa rapidité
d'action et de la fréquence des tableaux compliqués chez les sujets âgés. Il peut être aussi indiqué en cas de
résistance à plusieurs traitements antidépresseurs bien conduits. Il expose surtout au risque de syndrome
confusionnel post-critique, plus élevé que chez le sujet jeune.
3.3 Autres types de prise en charge
ƒ Stratégies psychosociales
La mise en place d’aides à domicile, d’incitation à une participation sociale familiale ou de voisinage ( clubs du troisième âge, activités physiques etc.) font partie de la stratégie thérapeutique. L'efficacité de ce type de socialisation a été évaluée en termes de santé objective et subjective, mais insuffisamment en ce qui concerne spécifiquement la dépression. ƒ Les prises en charge psychothérapiques
Elles ont démontré leur efficacité, mais sont rarement mises en place. Les indications sont les mêmes que chez l’adulte : elles sont à proposer en cas d'échec du traitement chimiothérapique, en cas de contre-indication de ces traitements, ou en cas d’effets secondaires trop importants. Les indications préférentielles sont les états dépressifs légers à modérés. Cependant, associées aux traitement chimique elles en améliorent le résultat, surtout en prévenant les récurrences. Pour leur mise en place elles nécessitent l'adhésion de la personne et quelquefois de son entourage familial. Les techniques psychothérapiques les plus utilisées sont les thérapies de soutien, qui sont basées sur une relation de confiance à partir d’une vision réaliste des objectifs à atteindre et des possibilités . Cette approche peut aider le patient à accepter la diminution de ses capacités liées à l'âge. Elles sont surtout centrées sur "l’ici et maintenant" dans un but pragmatique et pour aider la personne à faire face aux difficultés actuelles. Elles donnent des informations sur le fonctionnement dépressif, aident la personne à reconnaître et accepter le fait douloureux. L’objectif est la modification des symptômes et des conduites. Il faut souligner l'intérêt des psychothérapies cognitives, basées sur le principe des idées négatives que génèrent la dépression et qu’il est possible de modifier: idées négatives vis à vis de soi-même, du monde environnant ou du futur. Le thérapeute identifie avec le patient les situations responsables de sentiments négatifs et dépressifs et l’aider à y substituer des pensées positives réalistes, tout en reconnaissant l'authenticité de l’affect dépressif. La qualité de la relation médecin-patient est essentielle au succès de la prise en charge. La voie est étroite pour le patient (et quelquefois pour son médecin) entre une médicalisation excessive de la dépression et la banalisation de la prise de psychotropes.

Source: http://udsmed.u-strasbg.fr/emed/courses/MODULE05/document/ITEM_63_Confusion_Depression.pdf?cidReq=MODULE05

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NPA 200817b 3 Jun 2008 (Compiled: Juergen Knueppel, for INFO from Orig.200608) Page 287 of 647 Aeroplane, Helicopter PPL 040 00 00 00 HUMAN PERFORMANCE 040 01 00 00 HUMAN FACTORS: BASIC CONCEPTS 040 01 01 00 Human Factors in aviation 040 01 01 02 Becoming a competent pilot 040 02 00 00 BASIC AVIATION PHYSIOLOGY AND HEALTH MAINTENANCE 040 02 01 01 The atmosphere – composition

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